Quels liens entre sommeil paradoxal et quotient intellectuel dans la narcolepsie de l’enfant ?
Marine THIEUX
INSERM-U1028, Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon (CRNL), Equipe Waking – Physiologie Intégrée du Système d’Eveil Unité de sommeil pédiatrique, service d’épileptologie clinique, des troubles du sommeil et de neurologie fonctionnelle de l’enfant, Hôpital Femme-Mère-Enfant, Hospices Civils de Lyon.
Des plaintes concernant différents domaines cognitifs sont fréquemment rapportées par les enfants souffrant de narcolepsie. 30 % de ces enfants ont des difficultés scolaires. En effet, en association avec la somnolence diurne excessive, ils relateraient des difficultés d’attention et de mémoire, impactant généralement la réussite scolaire et les apprentissages. Ces plaintes ne permettent pourtant pas toujours d’objectiver de réelles difficultés…
Nous avons évalué le quotient intellectuel (QI) de 74 enfants souffrant de narcolepsie, âgés de 5 ans à 17 ans (43% de garçons, 91% avec cataplexies, 64% obèses).
Le HP avait un effet « protecteur » sur les difficultés scolaires, les troubles du comportement et des apprentissages. En effet, ce haut potentiel pourrait jouer le rôle de « réserve cognitive » et ainsi, permettre de compenser les difficultés d’attention et de mémorisation rapportées par les enfants.
Les enfants narcoleptiques avec un QI moyen-à-faible étaient plus souvent obèses et avaient plus souvent des désaturations de > de 3%, suggérant que les enfants avec comorbidités (obésité, syndrome d’apnées du sommeil, …) pourraient présenter une expression clinique plus sévère de la maladie.
D’autre part, la quantité de sommeil paradoxal (SP) au cours de la nuit était associée au score de QI : le score de QI augmente avec la quantité de SP. Le sommeil paradoxal, en quantité considérable dans la narcolepsie, pourrait jouer un rôle dans la consolidation mnésique, les apprentissages et la créativité.
En conclusion, la narcolepsie, en elle-même, ne permet pas d’expliquer une atteinte du fonctionnement intellectuel mais il est primordial de diagnostiquer et prendre en charge les comorbidités le plus précocement possible, afin de permettre aux enfants d’exploiter leurs capacités cognitives et de réduire ainsi leurs difficultés scolaires et comportementales.
marine.thieux@chu-lyon.fr
Publication parue dans Journal of Clinical Medicine (décembre 2020)